vendredi 19 juin 2015

AZF : L'imposture judiciaire du bang sismique


Voici l’extrait (page 171 et 172) de l’arrêt de la cour d’Appel du 24 septembre 2012 qui met en avant la théorie du bang sismique proposée par la responsable sismologue de l’Observatoire Midi-Pyrénées de Toulouse (OMP), Annie Souriau, dès le 26 septembre 2001, pour expliquer la survenance d’un premier bruit d’explosion plusieurs secondes avant l’énorme bruit de l’explosion d’AZF. Cette théorie a été adoptée par les experts judiciaires de l'affaire AZF, les juges d'instruction, les juges des procès etc... alors que Mme Souriau n'a jamais été nommée expert.

Cette théorie du "bang sismique", véritable première mondiale en sismologie, étrangement imposée en toute hâte, le 26 septembre 2001 est une véritable imposture.

Voici, à travers la lecture détaillée de l’arrêt d'Appel du 24 septembre 2012, une idée des anomalies, des erreurs, des amalgames, des confusions et des mensonges, que ce volet sismologique judiciaire a osé pondre comme "la position de la cour sur les analyses scientifiques".

Il est fort heureux que c'est arrêt ait été cassé par la cour de cassation le 13 janvier 2015, mais l'imposture sismologique demeure dans la mesure où toute l'enquête judiciaire d'AZF-Toulouse s'est basé sur celle-ci !


« La position de la cour sur les analyses scientifiques

 L'Observatoire Midi Pyrénées (OMP) qui appartient au Réseau National de Surveillance Sismique, a enregistré au moyen d'un sismographe au rebut placé dans un laboratoire situé à 4,2 kms de la source les ondes émises le 21 septembre 2001 dans la matinée. Les sismologues de l'OMP sous la direction de Mme SOURIAU, elle-même directrice de recherches au CNRS, ont corrigé les imperfections de l'appareil et entrepris l'exploitation des données enregistrées.
Les résultats de leurs travaux ont donné lieu à une note publiée dans les compte rendus de l'Académie des Sciences de mars 2002. L'étude en question fait apparaître que l'explosion qui s'est produite le 21 septembre 2001 sur le complexe chimique au sud de TOULOUSE a engendré des ondes élastiques équivalentes à un séisme de magnitude proche de 3,4 enregistrées par les stations sismologiques du Réseau National de Surveillance Sismique. Elle présente une analyse précise des enregistrements qui s'appuie sur les éléments connus de la structure régionale et sur une modélisation par sismogrammes synthétiques.
La note comporte une étude détaillée basée à la fois sur les enregistrements des stations sismologiques du RSSP et sur l'enregistrement de l'OMP qui s'est avéré de bonne qualité après correction. Selon cette étude, les signaux des enregistrements «Pyrénées » mettent en évidence plusieurs arrivées d'énergie, des arrivées d'énergie sismiques et un signal acoustique correspondant à une propagation dans l'air arrivant en fin d'enregistrement.
Elle mentionne que les deux explosions perçues par la population à une certaine distance peuvent correspondre l'une à la propagation de l'explosion par le sol (la plus rapide) l'autre à la propagation par l'air, la différence de temps entre les deux devant alors augmenter avec la distance à la source. Le rapport précise que si une autre explosion a eu lieu, elle n'a pas engendré de signal sismique détectable (elle n'était pas couplée au sol, ou était d'énergie trop faible).
Devant la cour, Mme SOURIAU a présenté les missions de l'équipe de sismologie de l'OMP, l'appareillage concerné par l'analyse du laboratoire (un enregistreur en test et un sismographe au rebut) et les corrections relatives au temps et aux amplitudes effectuées sur le matériel.
Elle a confirmé que le signal sismique s'explique bien par une seule explosion qui s'est propagée dans le sol et est obligatoirement associée à la formation du cratère, et que les phases multiples sont dues à la multiplicité des trajets des ondes sismiques au sol.
Elle a confirmé que l'énergie de l'onde P enregistrée par l'OMP était suffisante pour que la conversion sol-air des déplacements sismiques génère des sons. Elle a précisé que si le premier bang est dû à l'onde sismique, la différence de temps entre les deux bangs doit augmenter avec la distance, alors que s'il y a deux explosions distinctes, la différence de temps entre les deux bangs doit rester constante avec la distance.
Elle en a conclu que s'il y a eu une autre explosion, elle est soit trop petite pour avoir donné un signal sismique, soit non couplée au sol et que le signal sismique a vraisemblablement pu donner un son bien audible jusqu'à une distance d'une vingtaine de kilomètres.
Elle a également confirmé que les sismographes n'ont enregistré aucun signal précurseur avant celui créé par l'explosion du 221. »



I - "L'Observatoire Midi Pyrénées (OMP) qui appartient au Réseau National de Surveillance Sismique, a enregistré au moyen d'un sismographe au rebut placé dans un laboratoire situé à 4,2 kms de la source les ondes émises le 21 septembre 2001 dans la matinée."


Le mot « rebut » signifie en fait :
  • que le sismographe n’était pas enterré et qu’il était posé par terre sans être destiné à mesurer des signaux,
  • qu’une des deux composantes horizontales n’étaient pas du tout installée correctement dans l’appareil,
  • que la calibration des amplitudes des signaux perçus n’était pas du tout connue,
  • que l’origine des temps n’était également pas calée sur une horloge absolue,
  • que l’orientation de l’appareil n’était pas précise non plus,
  • et que cet appareil n’a jamais été saisi, conservé ou même photographié pour les besoins de la justice en 2001.
Ca fait beaucoup pour considérer que cet appareil toulousain valait beaucoup mieux que l'ensemble des dizaines de sismographes des réseaux nationaux à trois composantes parfaitement horodatés et dédié justement aux études sismologiques !


II - "Les sismologues de l'OMP sous la direction de Mme SOURIAU, elle-même directrice de recherches au CNRS, ont corrigé les imperfections de l'appareil et entrepris l'exploitation des données enregistrées."


Ces corrections n’ont jamais fait l’objet du moindre rapport technique, de la moindre expertise, et n’ont jamais été certifiées. Seule la parole de Mme Souriau, jamais nommée expert, permet de garantir la qualité de ces corrections. 

En réalité, ces corrections ne sont pas du tout fiables et encore moins précises. Elles ont jalonné le cours de l’instruction avec des correctifs imposés par des petites notes ou des auditions de Mme Souriau, jusqu’en octobre 2004. 

Elles ont été multiples et parfois contradictoires. Elles n’ont parfois été communiquées qu’à la justice sans que l’Académie des Sciences ou la communauté scientifique n’en soient publiquement averties.

Voici quelques exemples :

II.1 - Le calage horaire absolu a été fourni sans aucun document l’attestant. Aucune date précise de début des signaux n’a été fournie avant l'audition du 15 octobre 2004 de Mme Souriau (pièce D5020). Aucune expertise n’a été déclenchée pour certifier ce recalage horaire pourtant essentiel pour cette théorie sismologique et pour la vérité. En fait, seules les légendes des courbes des sismographes permettent une évaluation approximative de ce calage horaire.

II.2 - Il existe deux versions différentes du calage horaire. La première, communiquée le 28 septembre 2001, démarre les signaux à 10h17’44 (pièce D842).


La seconde version d'horodatage absolu, proposée en mars 2002, démarre environ 1.2 secondes plus tard à 10h17’45.181 (pièce 1966 page 8).


La première idée précise de ce second calage horaire a été fournie indirectement en mars 2002 avec la date des arrivées d’ondes P proposée à 10h17’56.86 selon Mme Souriau (pièce D1967 page 2).


Mais cette datation d’arrivée des ondes premières, nommées ondes P, à 10h17'56.86, contredit le seul document publique qu’elle a soumis à la DRIRE le 28 septembre 2001 et au Ministère de l'Environnement le 31 octobre 2001, à savoir 10h17’57.68" selon les repérages de ses courbes.

Un écart de 0.82 seconde, à la vitesse sismique locale des ondes P de 3 km/s, contrôlée en 2004 lors des tests sismiques, représente 2460 mètres d'écart géographique, pas moins !


Mme Souriau a proposé deux valeurs différentes d’incertitudes sur cette datation absolue. Une est maximalisée à 0.05 secondes dans le rapport publique de l’Académie des Sciences. L’autre est proposée à 0.02 secondes dans le cadre de ses auditions à la justice et de l’exploitation de cette précision par les experts judiciaires depuis 2002. Cette imprécision de 0,05 sec représentent déjà 150 mètres d'écart à la vitesse des premières ondes sismiques entre le cratère et l’OMP (environ 3km/s).

II.2 - Il existe deux versions de fichiers Titan des courbes sismologiques de l’OMP : le fichier Titan 1 et le fichier Titan 2 nommés ainsi par la défense. Le premier propose une durée d’enregistrement de 0,4 secondes plus longues que le second. De plus, le démarrage des signaux n’est pas le même pour chacun des fichiers et le fichier Titan 2 a vu 2 secondes rognée (128 échantillons / 62,5 Hz) sur son démarrage par rapport au premier fichier Titan 1. Aucune date absolue ou non recalée des démarrages de ces signaux n’a été communiquée avec ces fichiers.


II.4 - Mme Souriau a proposé jusqu’en 2004, une amplitude maximale des signaux sismiques de 0.5 mm/sec (vitesse particulaire), que ce soit pour les fichiers Titan1 ou Titan 2 et dans ses articles de l'OMP-DRIREet de l'Académie des Sciences.


Puis, le 15 octobre 2004, lors de son audition auprès du juge Thierry Perriquet, elle divise arbitrairement cette amplitude d’environ 5 fois, ramenant celle-ci à 0.1 mm/sec.


Cette dernière amplitude d'environ 0.1 mm/sec sera celle exploitée en 2004 et 2005 par les experts judiciaires et les sapiteurs suite aux tests sismiques de l’été 2004. Cette amplitude plus faible permet d’obtenir une amplitude de la seconde phase sismique dite "acoustique" inférieure à 0.02 mm/sec. Cette valeur est bien entendu plus réaliste pour faire croire à des effets sismo-acoustiques. Comme en 2001, aucune explication technique n’est fournie pour justifier ce changement de calibrage, arbitraire et absolument pas argumenté et encore moins certifié.


Ce nouveau calibrage pose, en revanche, de sérieux problèmes de comparaison avec les amplitudes de sismogrammes homologués des réseaux nationaux. En effet, cette amplitude maximale de 0.100 mm/sec est quasiment la même que celle mesurée en 2004 lors des tests sismiques de 35 kg de charges de TNT enterrées, qui n’ont bien entendu jamais déclenché de séisme significatif comme en 2001 (0.0698 mm/sec). La magnitude d'environ 3.4, exceptionnelle pour un séisme issu d'une explosion au sol, mesurée par les réseaux sismologiques nationaux et internationaux, est extrêmement loin de celle autorisée par la préfecture et à peine perceptible lors des tests sismiques sécurisés de l'été 2004 (magnitude <1.5). Ce nouveau calibrage est donc complètement aberrant et ne pouvait être validé par la justice.
 

II.5 - L’orientation de l’appareil a été aussi changée par Mme Souriau de quelques degrés d'angle, et ce à deux reprises. La dernière des deux corrections est l’une des rares qu’elle a communiquée à la fois à la justice et au milieu scientifique. Mais cette correction ne repose sur aucune preuve matérielle, ni sur aucune photographie prise à l’OMP.

II.6 - Mme Souriau a caché l’existence de la troisième composante du sismographe de l’OMP à la justice qu’elle n’a jamais étudiée, prétextant que cette composante était inopérante. En réalité, si l’amplitude de ces signaux est anormalement très faible par rapport aux deux autres composantes, elle n’en est pas moins lisible et présente des premiers pics d’ondes de compression exactement calés temporellement sur les pics de la composante verticale. Elle a tenu à indiquer, dès les premiers jours, que « la composante horizontale manquante, perpendiculaire à la direction AZF-OMP, a peu d’intérêt dans le cas d’une source explosive (pas d’onde de cisaillement) ». Là encore, l’arbitraire passe avant le raisonnement scientifique.

Voici un extrait exploitable de la 3ème composante issu du rapport de Michel Stasi de 2003.



III - "Les résultats de leurs travaux ont donné lieu à une note publiée dans les compte rendus de l'Académie des Sciences de mars 2002. L'étude en question fait apparaître que l'explosion qui s'est produite le 21 septembre 2001 sur le complexe chimique au sud de TOULOUSE a engendré des ondes élastiques équivalentes à un séisme de magnitude proche de 3,4 enregistrées par les stations sismologiques du Réseau National de Surveillance Sismique. Elle présente une analyse précise des enregistrements qui s'appuie sur les éléments connus de la structure régionale et sur une modélisation par sismogrammes synthétiques."


Il est surprenant de voir que les juges d’Appel ont oublié, dans cet arrêt, l’existence de la première note de Mme Souriau communiquée le plus officiellement possible à la DRIRE dès le 26 septembre 2001 (pièce D842). C’est cette note qui a imposé la thèse du bang sismique dès les premiers jours. Cette note a permis d’éliminer de l’enquête judiciaire déclenchée le 28 septembre 2001, les recherches de l’origine de la première explosion.

La thèse de l’accident chimique, où tout démarre au hangar 221, thèse fortement suggérée par le Procureur Michel Bréard, s’appuie, en grande partie, sur cette notion du bang sismique. Cette note fait mention d’une quasi-certitude sur le bang sismique car Mme Souriau affirme que « les premiers témoignages recueillis favorisent l’interprétation de deux bangs dûs à une seule explosion. ». 

Mme Souriau n’a jamais communiqué ces témoignages recueillis lui indiquant une augmentation des délais en fonction de la distance au cratère. Ce rapport OMP-DRIRE a été également le seul document sismologique utilisé (en annexe G) par l’Inspection Générale de l’Environnement pour l’affaire AZF-Toulouse fin octobre 2001. 

Les juges ont aussi oublié d'évoquer ce rapport commandé par le Ministère de l'Environnement. L'article de l'Académie des Sciences, dont parle les juges, a paru plus tard, en Février 2002, et a rapidement été intégré au dossier judiciaire en mars 2002.

Des conclusions déposées par des parties civiles ont demandé à la cour de répondre sur l’occultation par Mme Souriau de ces témoignages inconnus. Même si dans ces notes, Mme Souriau laisse ouverte la voie de confirmation par de nouveaux témoignages, c’est bien cette thèse du bang sismique, absolument pas étayée qui a fait « force de loi » dès le 26 septembre 2001 pour l’ouverture de l’enquête et qui continue à faire « force de loi » dans cet arrêt du 24 septembre 2012. Aucune réponse sur cette demande de la part de ces juges !


IV - "La note comporte une étude détaillée basée à la fois sur les enregistrements des stations sismologiques du RSSP et sur l'enregistrement de l'OMP qui s'est avéré de bonne qualité après correction."


Ces corrections ne présentent aucun rapport détaillé, aucune datation absolue clairement affichée, elles n’ont fait l’objet d’aucune expertise, d’aucune nomination d’expert sismologue, elles cumulent erreurs, incohérences et approximations, elles ne sont absolument pas des corrections de bonne qualité. 

Cette affirmation des juges est purement gratuite et repose, de plus, sur le refus effectif et conscient de ne répondre à aucune des questions précises et importantes soulevées dans les nombreuses conclusions communiquées par des parties civiles.

Des parties civiles ont demandé des explications sur la différence notable entre les durées d’enregistrement de 9 des 18 sismogrammes du réseau national sismologique RéNaSS fournies par Mme Souriau dans ses rapports de 2001 et 2002. Ces durées sont étrangement écourtées dans les publications détaillées du RéNaSS alors que les courbes générales et imprécises des rapports de l’OMP montrent ces mêmes courbes beaucoup plus longues, au-delà de 10h19. 

Les juges, incapables de savoir ce qu’est une vraie étude sismologique, semblent donc ignorer également cette anomalie grave qui est passé à travers ces « fameuses » études détaillées de Mme Souriau. Les juges ont pourtant été alertés par les conclusions des parties civiles et n’ont nulle part répondu.




V - "Selon cette étude, les signaux des enregistrements «Pyrénées » mettent en évidence plusieurs arrivées d'énergie, des arrivées d'énergie sismiques et un signal acoustique correspondant à une propagation dans l'air arrivant en fin d'enregistrement."


Confusion des juges d’Appel... ! Jamais les enregistrements « Pyrénées » du réseau RéNaSS n’ont mis en évidence le signal acoustique en fin d’enregistrement. D’abord, les enregistrements de ce réseau sont trop courts pour cela car le signal acoustique a mis plusieurs minutes pour atteindre les Pyrénées. De plus, l’échantillonnage de 62,5 Hz des sismographes et la précision de l’amplitude ne le permettrait quasiment pas. 

Les juges confondent avec l’enregistrement de l’OMP à 4,2 km du cratère. 

La Direction des Applications Militaires du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA-DAM), en revanche, disposant de sismographes fonctionnant 24h/24 de bien plus forte précision, a pu localiser ces signaux sismo-acoustiques. Les experts judiciaires géophysiciens et Mme Souriau qui écrit avoir tout vu avec le CEA-DAM dès fin septembre 2001, n’ont pas cherché à étudier ces données sismiques de qualité. 

Seul le rapport de 2006 des experts géophysiciens de Total (D7042) permet de voir et de dater approximativement ces signaux acoustiques visibles sur des graphiques sommaires du CEA-DAM. 

Les juges font donc référence à des données que les experts judiciaires n’ont même pas analysées, ni mentionnées.



VI - "Elle mentionne que les deux explosions perçues par la population à une certaine distance peuvent correspondre l'une à la propagation de l'explosion par le sol (la plus rapide) l'autre à la propagation par l'air, la différence de temps entre les deux devant alors augmenter avec la distance à la source."


Encore une erreur de nos juges… ! La perception d’un bruit sismique n’a rien à voir avec la perception d’un « bang » comme beaucoup de témoins et des enregistrements l’ont relatée. 

En effet, les hautes fréquences d’un bruit d’explosion, tout comme n’importe quelle autre haute fréquence générée directement par l’onde de choc d’une charge explosive, sont absorbées à très faible distance par le sol et ne peuvent donc voyager au-delà de quelques mètres. 

Toutes les expériences d’explosions au sol de grosses charges ont montré que le bruit issu de cette propagation sismo-acoustique était très sourd, à de très basses fréquences.

Ces basses fréquences sont, de plus, physiquement, incapables de se convertir brutalement en haute fréquence en remontant à la surface. Ni Mme Souriau, ni les experts judiciaires n’ont pu montrer le moindre document scientifique démontrant l’apparition de hautes fréquences d’origine sonore surgissant du sous-sol comme un « bang ». 

Lors de séisme naturel, des bruits de grondement, d’explosion sourde, sont perceptibles. 
Beaucoup de témoins entendent aussi le bruit des structures humaines impactées par les ondes sismiques. Ce bruit de bâti ou d’objets peut bien entendu avoir des fréquences plus hautes mais il n’est pas à confondre avec le bruit sismique direct. Rien n’a donc empêché des témoins d’entendre ces bruits de structures humaines mais les témoins de ce premier bruit, situés dehors, ou très proches du cratère (moins de 300 mètres) n’avaient, eux, aucune raison d’entendre le moindre « bang sismique » direct ou indirect.

Mme Souriau en imposant cette théorie inédite, jamais retrouvée dans aucune publication scientifique, savait à l’avance que des confusions avec le bruit du bâti seraient sur-exploitées, mais elle a tenu à imposer ses témoignages « invisibles » dès son rapport destiné à la DRIRE afin d’éviter l’étude prioritaire sur les témoignages extérieurs et les témoignages proches du cratère. 

Les juges d’Appel reprennent donc intégralement cette stratégie mensongère et perverse dans cet arrêt, souhaitant comme les experts judiciaires couper court à toute autre recherche d’explication du premier bang.

Cette erreur des juges est d’autant plus surprenante qu’ils ont eu la chance d’entendre un témoin scientifique du CNRS, cité par des parties civiles, M Alain Joets, qui a publié, lui aussi, à l’Académie des Sciences, la réfutation de la thèse du bang sismique de Mme Souriau. Encore un silence total à ce propos dans l'arrêt en réponse aux conclusions des parties civiles. C'est tellement plus simple de ne pas répondre aux conclusions !


7 - "Le rapport précise que si une autre explosion a eu lieu, elle n'a pas engendré de signal sismique détectable (elle n'était pas couplée au sol, ou était d'énergie trop faible)."


Ce raisonnement n’est valable que si l’on suppose que le premier signal sismique est bien celui de l’explosion du hangar 221 et donc que seul un bruit de fond précède ces premiers signaux. Or, sans même chercher à la démontrer, Annie Souriau, les rapports du CEA-DAM ou les experts judiciaires ont toujours supposé comme acquise l’association du séisme de magnitude 3.4 avec l’explosion du hangar 221 et la formation du cratère d’AZF. Etrange ! 

Aucun d'entre eux n’a cherché à démontrer scientifiquement cette association à partir des données sismiques du 21 septembre 2001. Notamment, la vérification du positionnement de l’épicentre principal est réalisable à partir de la connaissance et de la comparaison des vitesses des premières ondes de compression, très aisément repérables au 1/100ème de seconde près, sur tous les sismographes à moins de 200 km. 

Ce contrôle très simple de la version officielle sismique permet de constater des écarts de vitesses énormes entre les stations à l'Ouest et à l'Est. Certaines de ces vitesses moyennes sont carrément en dehors des limites de 5700 à 6300 m/sec ! 

Mme Souriau a même triché de plus de 1,21 seconde sur une des datations d'ondes P par rapport aux données du RéNaSS (sismographe de Labassère dans les Hautes-Pyrénées). 

Elle a rajouté dans ses calculs des données espagnoles de stations très éloignées et donc encore moins précises. 

Plus aberrant encore, Mme Souriau a aussi mélangé des données de précisions différentes comme 0.01 sec pour le RéNaSS, 0.50 sec pour l'OMP et 0.10 seconde pour le réseau LDG du CEA Militaire, alors que, si elle l'avait voulu, toutes ces datations auraient pu être prises en compte à 0.01 seconde près ! Un vrai massacre anti-scientifique !

Une vérification par comparaison sur les vitesses d’ondes P du réseau pyrénéen permet de se rendre compte qu’un séisme principal au niveau du cratère à l’heure imposée des experts judiciaires est impossible alors qu’il l’est sous la colline de Pech David, 2 km à l’Est

Cité par des parties civiles le 13 décembre 2011, j'ai pu révéler à la cour le problème des vitesses d’ondes P incompatibles avec les affirmations péremptoires de Mme Souriau et expliquer pourquoi l'épicentre principal était nécessairement sous la colline de Pech David. Là encore silence total de la cour. Le témoin peut parler mais aucune discussion scientifique ne peut être abordée en sismologie !



Cette hypothèse de l’épicentre principal associé arbitrairement au hangar 221 d'AZF élimine donc automatiquement la seule hypothèse jamais évoquée par Mme Souriau ou les experts judiciaires : le principal signal sismique ne pourrait provenir que d’une explosion souterraine profonde

Une explosion souterraine ou même un effondrement de galerie pourrait expliquer à la fois la forte magnitude de 3.4, l'absence de trace notable au sol, les fortes ondes S de cisaillement et toutes les anomalies relevées sur les courbes de l'OMP.  

Ce séisme principal serait alors suivi, quelques secondes plus tard, par un second signal sismique, beaucoup plus modeste, issu de l’explosion en surface du hangar 221 et très difficilement détectable sur le réseaux national du RéNaSS (magnitude <1.8). 

La seconde phase dite « acoustique » du sismographe de l’OMP, situé à 4,2 km, pourrait être, en fait, l’effet sismique de l’explosion du hangar 221

Une troisième phase sismo-acoustique due à l'onde de choc aérienne existe bien sur les courbes de l'OMP mais elle serait visible à condition d'étudier de manière précise ces courbes, en tenant compte d'une amplitude maximale calibrée au moins à 5 mm/sec. Cette amplitude des courbes de l'OMP serait, elle, compatible avec les amplitudes des réseaux nationaux et avec la magnitude de 3.4.


VIII - "Devant la cour, Mme SOURIAU a présenté les missions de l'équipe de sismologie de l'OMP, l'appareillage concerné par l'analyse du laboratoire (un enregistreur en test et un sismographe au rebut) et les corrections relatives au temps et aux amplitudes effectuées sur le matériel. Elle a confirmé que le signal sismique s'explique bien par une seule explosion qui s'est propagée dans le sol et est obligatoirement associée à la formation du cratère, et que les phases multiples sont dues à la multiplicité des trajets des ondes sismiques au sol."


Là encore, les juges reproduisent un amalgame grossier suggéré par les rapports de Mme Souriau et du CEA Militaire. La multiplicité des trajets des ondes sismiques existe bien mais elle n’exclut aucunement la superposition de plusieurs phases sismiques provenant de sources sismiques différentes. Mme Souriau n’a donc absolument rien prouvé. Elle devait d’abord démontrer que le séisme principal était nécessairement issu de l’explosion du hangar 221. Elle ne l’a pas fait alors que cela lui était facile techniquement si elle disait vrai !

Ces mêmes documents sismologiques n’ont jamais été exploités avec objectivité et de manière exhaustive. Il serait, ainsi, très intéressant de connaître et d’exploiter, l’ensemble des enregistrements sismiques de la matinée de ce 21 septembre 2001, appartenant à l’ensemble des réseaux sismologiques : enregistreur OMP avec ces 3 composantes, données entières (non censurées) du RéNaSS, données ultra-précises du CEA Militaire et données des systèmes anti-sismiques des centrales nucléaires d’EDF dont Golfech.

Qui, dans ce monde judiciaire, sait que le RéNaSS et le CEA-DAM ont repéré des ondes cisaillement, incompatibles avec cette « seule explosion », à plus de 800 km de Toulouse ?! 

Un repérage de ces ondes de cisaillement (ondes S) pouvait encore à 500 km du cratère permettre au CEA Militaire une évaluation de la magnitude. Ce point contredisant les affirmations de Mme Souriau et demandant des explications dans des conclusions, a, la aussi, été nié par les juges d'Appel.








IX - "Elle a confirmé que l'énergie de l'onde P enregistrée par l'OMP était suffisante pour que la conversion sol-air des déplacements sismiques génère des sons."


« Elle a confirmé »… mais elle n’a jamais rien démontré encore ! N’étant même pas nommée expert dans ce dossier par aucune des parties, le fait de confirmer ses dires n’a aucune valeur de preuve. Sans rapport d’expertise, les convictions des juges d’appel au sujet des dires de Mme Souriau n’ont donc aucune assise !

Si « l’ énergie de l’onde P était suffisante », comment Mme Souriau et les juges peuvent-ils alors expliquer que l’amplitude de ces ondes mesurées à l’OMP le 21 septembre 2001, est quasi-similaire à celle des ondes P des tests de 2004 concernant des petites charges enterrées de 35 kg de TNT. 

Les tests sismiques de l’été 2004, pour des raisons de sécurité, ne pouvaient dépasser une magnitude de 1,5. La magnitude de 3,4 mesurée en 2001, correspond donc à une énergie de 500 à 1000 fois plus grande que celle engagée en 2004… Il y a contradiction flagrante ! Les juges ne la voient pas ?

Toutes les études du collège des experts judiciaires menées par M. Jean-Louis Lacoume, après les tests sismiques de l'été 2004, ont évacué, dès le départ, toute exploitation des amplitudes qu'elles soient celles des courbes de 2001 ou de 2004 : une aberration scientifique scandaleuse et révélatrice pour ce collège d'experts.

En réalité l'amplitude des courbes de l'OMP est énorme (>5 mm/sec) et permet de visualiser, en heure absolue, 2 phases sismiques pures à 9 secondes d'intervalle, 10h17'57.7 et 10h18'06.6 et une phase sismo-acoustique encore 11 secondes plus tard à 10h18'17.3. Les conclusions de parties civiles ont clairement exigé des réponses sur ce point des amplitudes resté inexpliqué.

Ce n’est pas parce que la défense n’a pas relevé précisément les arnaques sismologiques de Mme Souriau, du CEA Militaire dès 2001 et celles des experts du collège de Jean-Louis Lacoume en 2004-2005, que ces conclusions de parties civiles ne méritent pas de réponses. 

Les Toulousains ne le mériteraient-ils pas non plus ?


X - "Elle a précisé que si le premier bang est dû à l'onde sismique, la différence de temps entre les deux bangs doit augmenter avec la distance, alors que s'il y a deux explosions distinctes, la différence de temps entre les deux bangs doit rester constante avec la distance."


Frôlons-nous l’incompétence des juges pour lire de tels raisonnements ?

Ce raisonnement limite les hypothèses à la survenance de deux bruits d’explosions localisés au même endroit. Est-ce forcément le cas ? Et bien non !

Si un premier bruit a eu lieu à 1200 mètres à l’Est du cratère, il sera perçu avec 3 secondes d’avance par les témoins de l’Est et 3 secondes de retard par les témoins de l’Ouest, d’où des écarts de temps entre les perceptions d’explosions pouvant dépasser 6 secondes selon les témoignages.

Les juges ont donc repris intégralement le raisonnement inepte du premier rapport OMP-DRIRE de Mme Souriau.

De plus, Mme Souriau suppose qu’un bruit sismique pourra sans problème être perçu à de grande distance… ce qui est complètement contraire à toute réalité géophysique. Encore une allégation anti-scientifique de Mme Souriau, reprise ici in-extenso par nos juges !

La déperdition d’énergie dans le sous-sol est extrêmement rapide, même pour des bruits sourds de quelques hertz de fréquence. L’énergie, à partir de quelques mètres de distance de la source, n’est plus suffisante pour restituer un effet sonore largement audible.

Le premier bang des enregistrements sonores de Air-France Montaudran, de l’Hôtel Dieu, de l’Urssaf, pris souvent comme le bang d’un mur du son par les témoins présents très interloqués, sont à plus de 2,5 km ou jusqu’à 4 km pour Air-France. 

Si la déperdition d’énergie permettait cela, à moins de 1 km du cratère, le premier bruit aurait été énorme, même en survenant près d’une seconde avant celui d’AZF. Dans ce rayon de 1 km, tous les témoins auraient vécu un double bang rapproché. Ce ne fut pas le cas pour la très grande majorité. On ne compte pas le nombre de témoins qui, à cette distance, ont pu évaluer un écart de temps entre les deux bruits de 5 à 10 secondes, écart complètement incompatible avec la théorie du bang sismique.


XI - "Elle en a conclu que s'il y a eu une autre explosion, elle est soit trop petite pour avoir donné un signal sismique, soit non couplée au sol et que le signal sismique a vraisemblablement pu donner un son bien audible jusqu'à une distance d'une vingtaine de kilomètres. Elle a également confirmé que les sismographes n'ont enregistré aucun signal précurseur avant celui créé par l'explosion du 221."


Ces dernières lignes résument la prise en compte à 100% par ces juges d’Appel, des deux principales arnaques portant sur le « bang sismique » et sur l’association du séisme principal à l’explosion du hangar 221.

Plus prudent, le juge Thomas Le Monnyer, en première instance, avait été réticent à mettre en évidence, dans son jugement, tous les dires de Mme Souriau. Ici, alors qu’aucun élément nouveau en sismologie n’a été proposé par Mme Souriau ou par les divers experts et sapiteurs, ces juges s’appuient à nouveau largement sur les assertions de cette sismologue de l’OMP, tout comme l’avait fait en septembre 2001, le procureur Michel Bréard. Ces juges y étaient obligés car ils souhaitaient affirmer péremptoirement qu’aucune explosion n’a pu avoir lieu avant celle du hangar 221, laissant, contrairement au premier procès, aucun petit pourcentage de doute à une piste explosive antérieure.



Conclusion

Peut-on encore, à notre époque, subir de telles méthodes judiciaires et anti-scientifiques !

Y-a-t-il un sismologue sur cette planète suffisamment honnête, courageux et objectif pour regarder les données sismiques du 21 septembre 2001 ?

Ah... j'oubliais...! Mme Souriau a obtenu du service juridique du CNRS que les courbes sismologiques de l'OMP, matière première essentielle de son article publique de l'Académie des Sciences de mars 2002, ne soient jamais rendues accessibles sans autorisation de la justice. 

Une vraie première dans le monde de la publication scientifique ! 

Des parties civiles qui ont demandé ces courbes au premier président de la cour d'Appel, Dominique Vonau, avant le procès, n'ont pas réussi à récupérer le moindre extrait copié de ces données !

La sismologue Annie Souriau serait-elle devenue, à elle toute seule, un Etat dans l'Etat grâce à cette affaire AZF-Toulouse ?

 
 Explosion de 100 tonnes de TNT, le 22 janvier 2006 :
exemple de bruit sismique sourd avant le son de l'explosion.

jeudi 18 juin 2015

AZF - Un élément clé du cratère effacé par des responsables de l'Etat


Moins de 6 heures après l’explosion, les autorités préfectorales de Haute-Garonne sont intervenues pour faire effacer par la société Cassin TP et les pompiers une grande trace au sol de 30 mètres de long formée au Nord-Ouest du cratère quelques instants avant l’explosion principale du hangar 221.
Ces mêmes autorités ont, par la suite, obtenu des experts judiciaires et des juges une obstruction systématique à toute exploitation technique de cette trace insolite filmée par la gendarmerie nationale 3 heures après l’explosion.
Voici les preuves de l'existence de cette trace, de son effacement dès le 21 septembre 2001 et des obstructions systématiques.






La gendarmerie a filmé dès 13h30, depuis son Ecureuil F-MJCC, une énorme trace au sol rectiligne et légèrement évasée mesurant plus de 30 mètres et située au Nord-Ouest du cratère.

Cette trace semble laisser l’empreinte au sol d’un phénomène violent surgissant de la partie Nord-Ouest du hangar 221. Elle racle le sol jusqu’au bâtiment RCU/SIS où plusieurs victimes ont trouvé la mort. Elle prend naissance au niveau des lèvres extérieures du cratère qui semblent l’avoir recouverte au moment de l’explosion. 

Très décalée à l’Ouest, cette trace au sol n’est absolument pas orientée selon les axes de l’onde de pression issue de la détonation du tas d’ammonitrate. La trace pourrait avoir été formée juste avant l’explosion finale et semble être l’indice d’un premier phénomène violent dans la partie ouest du hangar 221.


Sur les photographies de la gendarmerie, cette trace sombre semble se prolonger à l’intérieur du cratère par une zone sombre sur les lèvres Ouest intérieures. Mais il n’en est rien, la vidéo montre en revanche sur cette partie intérieure des lèvres un décrochement de la terre.

Photo SAMU du 21 septembre 2001 vers 17h20


II - Effacement de la trace sous ordre de la Préfecture


Dès l’après-midi, un employé conducteur d’engin de chantier de la société Cassin TP, présent sur le site, reçut vers 15h30, l’ordre du colonel des pompiers Donin et du préfet Hubert Fournier, de former un chemin de déblaiement sur l’emplacement même de cette grande trace filmée par la gendarmerie à 13h30. Dès la soirée du 21 septembre 2001, cette trace initiale était donc effacée sous ordre de responsables de l’Etat, sans la moindre explication et sans le moindre motif. Aucun document administratif dans le dossier ne mentionne cette intervention qui a pourtant bien eu lieu quelques heures après le drame.

 

Le chemin formé n’était d’aucune utilité dans cette zone ravagée par l’explosion où plus aucun mur n’avait tenu. Il était parfaitement possible, sans ce chemin, d’approcher le cratère comme plusieurs employés d’AZF, le directeur d'usine et des secouristes l’ont fait. Le cratère n’était pas en feu, les bâtiments étaient rasés dans cette zone Nord-Ouest du hangar 221, et aucun engin n’avait l’utilité d’emprunter quelques heures après l’explosion ce nouveau chemin formé se dirigeant vers les lèvres du cratère.
On peut constater, sur cette photographie d'EDF-RTE de l'après midi du 21 septembre 2001 (pièces D3516 du dossier), qu'un groupe d'hommes se trouve sur la partie la plus évasée de la trace et qu'un autre groupe de personnes, pour certaines penchées vers le sol, se trouve à la naissance de la trace au pied de la lèvre du cratère qui monte devant eux. Qu'examinaient-ils à cet endroit ?


Les engins anti-incendie sont intervenus à plus de 50 mètres au sud de cette trace pour éteindre la combustion de palettes stockées dans le bâtiment 224 dont il reste encore quelques traces et un mur aujourd’hui. La photographie noir et blanc de la Police Nationale, dans la pièce D1624 page 9 du dossier judiciaire en atteste. Mais personne n’a eu besoin de ce chemin au Nord-Ouest du cratère. Il semble bien avoir été réalisé dès l’après-midi pour cacher cette grande trace au sol formée lors de la catastrophe et filmée à 13h30.
Pourquoi ?

L’employé de Cassin TP que j’ai rencontré en 2008, m’a effectivement confirmé qu’il ne savait pas pourquoi il fallait réaliser ce chemin avec un bulldozer aussi vite alors qu’on cherchait encore des victimes dans ce secteur. Il m'a confirmé que le soir du 21 septembre 2001, le cratère était encore globalement sec. La nappe phréatique n'a rempli le cratère que le lendemain matin.


Les photographies des rapports finaux des experts judiciaires dateront de plusieurs jours après l'explosion. Elles montrent le joli chemin formé par Cassin TP émergeant des lèvres du cratère. Mais prenant ce chemin comme seul élément existant et donc indépendant de l'explosion, les experts judiciaires n'évoquèrent aucune fois cette première trace filmée vers 13h30 par la gendarmerie.


Jamais ces faits graves n’ont été dénoncés par les policiers en charge de l’enquête, comme le commissaire Saby qui était pourtant concerné en premier lieu par tous les éléments touchant ce cratère, ni même par les juges d’instruction ou les juges des procès. Ces responsables de la préfecture sous autorité de l’Etat se moquaient de savoir si des victimes ou même des bouts de victimes pouvaient encore se trouver à cet endroit. Le chemin a bien été formé à coup de bulldozer en toute hâte. A proximité, une voiture avait été complètement comprimée par l'explosion !


III - Tout le monde avait cette trace sous les yeux


Jamais, cette énorme trace au sol n’a été relevée, étudiée et donc encore moins expliquée par les experts judiciaires, dont le premier, Daniel Van Schendel, arriva sur les lieux d’AZF vers 15h le 21 septembre 2001 selon les retranscriptions radio de la Police Nationale (pièce D3914 du dossier).
Quelques employés de l’usine AZF avaient remarqué cette trace sombre sur des photographies aériennes fournies par la gendarmerie mais, ils n’avaient apparemment jamais pu analyser les images vidéo de la gendarmerie prises lors de la même mission aérienne, jusqu’à ce que les récupère auprès de M6-Toulouse fin 2007.
Tout comme le dossier judiciaire, la plupart des grands médias TV avaient eu accès à cette vidéo que la gendarmerie avait dupliqué pour eux dès la première semaine. Quelques extraits vidéo de cette trace étaient même visibles lors des premiers reportages télévisés de TF1 ou France Télévision de septembre 2001, avec certes une qualité relativement médiocre à l’écran.


Il est étrange de constater qu’à part quelques journalistes isolés qu’on a vite fait de ne pas écouter, la quasi-totalité des médias se sont royalement moqués de cette trace au sol et n’ont jamais cherché à ce que les experts fournissent des explications même si cette trace était postérieure de quelques secondes à l'explosion.

L'après-midi même, comme l'atteste une image vidéo de France 2, le directeur de l'usine Serge Biechlin (cheveux blancs), arrivé à Toulouse quelques heures après l'explosion, eut l'occasion de voir cette trace avant son effacement définitif par les bulldozers de Cassin TP.
Le lendemain matin à 9h41 (heure de la photographie du SAMU ci-dessous), la trace au sol avait bel et bien disparu. Un chemin avait pris place.


En 2008, l'écrivain Daniel Dissy a parlé précisément de cette étrange trace au sol dans son livre et son site internet "L'enquête secrète". Il émet plusieurs hypothèses sur son rôle et son intérêt dans l'enchainement possible des événements.


IV - Le groupe TOTAL peu motivé par cet élément insolite


En février 2008, interloqué de voir à travers le dossier judiciaire, le groupe Total, sans le moindre intérêt pour cette trace au sol, je suis monté à Paris - La Défense pour évoquer auprès d'un des responsables du groupe, les images de qualité que j’avais pu obtenir grâce à des journalistes de M6-Toulouse sur cette trace inexpliquée.
Malgré un entretien avec une des personnes présentes auprès du PDG Thierry Desmarest, le 21 septembre 2001, malgré quelques échanges de mails, le désintérêt du groupe Total pour cette trace était « total ». Incapable de fournir la moindre explication sur cette trace au sol, et incapable de s’interroger sur les raisons qui ont amené la préfecture à effacer cette trace par un chemin de déblaiement moins de 6 heures après. Aucun des responsables de ce groupe, ni même du cabinet d’avocats de la Défense de Me Soulez-Larivière, n’a eu l’intention d’en savoir plus. Le sujet était-il tabou ?

En fait, pas totalement, puisqu’en 2009, très discrètement, sur quelques lignes du rapport de la société ESIC et de l’Institut Géographique National qui avaient modélisé en 3D toute la zone du cratère pour le compte du groupe Total, l’ingénieur Michel Kasser parla brièvement de cette trace sans chercher vraiment à l’expliquer. Il conclut sans le moindre argument technique à un phénomène tardif postérieur à l'explosion qui aurait été marqué dans les éjectats. Le comparant à d'autres phénomènes à l'Est du cratère qui pourtant n'ont rien à voir, cet ingénieur n'a hélas pas cherché à comprendre pourquoi un souffle important aurait pu forger cette trace au sol après l'explosion. Contrairement à la partie Est du cratère, la modélisation 3D de ces ingénieurs exclua cette trace pourtant très remarquable. Elle ne participa donc pas aux débats du procès. Ce fut le seul document technique de tout le dossier judiciaire mentionnant l'existence de cette trace et confirmant par là qu'il ne s'agit pas d'un chemin de déblaiement visible sur les photographies dès le soir du 21 septembre 2001.

Dans le secteur oriental, la crête qui couronne le cratère est largement éventrée et déformée par des phénomènes tardifs qui donnent au cratère l’aspect si caractéristique de cratère égueulé. Ces phénomènes tardifs ont contribué à modeler et à adoucir la morphologie de ce flanc oriental. Des phénomènes tardifs équivalents ont été observés sur le flanc externe occidental du cratère avec notamment un large sillon de 29 m de long, 3 mètres de large et environ 0,5 à 1 mètre de profondeur qui a été creusé dans les éjectas de l’explosion. Cette trace a été longuement interprétée dans la presse comme “la trace noire” liée à des phénomènes divers (électromagnétiques,électriques,etc). Par ailleurs, la cartographie précise du cratère a permis de calculer avec une meilleure précision le volume du cratère. D’après les calculs présentés ici, ce volume serait de 7365 m3 au lieu de 8770 m3 comme cela avait été estimé initialement.


Le rapport n’a été versé qu’en 2009, soit 8 ans après l’explosion et bien après la clôture de l’enquête. Il ne fut accessible aux parties civiles qu'en 2011 ! La modélisation 3D de l’ESIC a finalement ignoré cette trace et ce sujet ne fut jamais abordé lors des exposés de ces travaux, et encore moins par les experts judiciaires pendant les procès !


V - La justice refuse d’évoquer et d’expliquer cette trace au sol

Suite à ces informations et à la récupération des documents par des parties civiles après le procès AZF de première instance, des courriers de victimes de l’explosion ont été soumis au Premier Président de la Cour d’Appel, Dominique Vonau, en septembre 2011, deux mois avant le début du procès en appel AZF Toulouse, pour demander des explications sur cette grande trace au sol.

Cet élément constituait le 5ème élément d’une série de sept éléments non expliqués demandant réponse dans la Lettre de la partie civile K. Baux. La cour d’Appel de Toulouse détenteur du dossier à l'époque ignora totalement cette demande. Ce fut le mépris total du Président Dominique Vonau face à ces questions et cette trace au sol, élément pourtant essentiel à la compréhension des événements.

Au procès en Appel, des conclusions de parties civiles furent déposées pour obtenir à nouveau des réponses. Là encore les juges d’Appel ont sciemment ignoré à 100% ces conclusions et n’ont même pas écrit une seule ligne à propos des images vidéo de la gendarmerie.

Tout le monde a pu voir au tout début du procès sur grand écran ces images de l’hélicoptère de la gendarmerie. Pendant quelques secondes, la grande trace est bien là au Nord-Ouest du cratère. Pendant des jours, les experts de tout bord, vont se chamailler sur l’hypothétique initiation de l’explosion à l’Est du cratère en s’acharnant à montrer la pertinence d’un petit monticule de terre dans la pente Est du cratère… mais à l’autre bout du cratère, la grande trace de 30 mètres de long, qui a creusé le sol sur plus de 50 cm de profondeur et 3 mètres de large, avec des bords très rectilignes suggérant un très violent phénomène sur un côté particulier du hangar 221, est, elle, sciemment ignorée !

Pourquoi cet étrange cinéma des experts judiciaires ?

Pourquoi faire croire que de ce côté Ouest du cratère, il n’y avait rien ?

Pourquoi la justice n’a-t-elle pas remarqué la création de ce chemin à l’endroit même de cette trace largement visible 6 heures après l’explosion ?

La justice Toulousaine savait-elle l’importance de l’opération de camouflage diligentée par la Préfecture ?


VI - La trace coïncide avec une conduite d’eau brute ignorée par le SRPJ de Toulouse


Le dossier judiciaire révèle qu’il existait bien une conduite d’eau de 40 mm de diamètre sous le tas d’ammonitrate (Pièce D603 page 7). Contrairement aux experts judiciaires qui ignorent cet élément structurel coïncidant avec le tas d’ammonitrate, la société SAUR a bien fourni un plan du réseau d’eau brute de l’usine AZF montrant cette conduite ancienne. Cette conduite traverse sur quelques dizaines de mètres le sous-sol du hangar 221 et était à disposition d’un éventuel branchement. Son extrémité Ouest coïncide avec le prolongement vers l’intérieur du cratère de l’axe de la grande trace (Superposition des pièces D12 page 1 et D603 page 7 du dossier judiciaire projetées sur un axe Sud-Nord).

La conduite a-t-elle un lien avec cette grande trace au sol ?

Malgré l’existence de ces plans de l’usine, les experts judiciaires adopteront à nouveau le système du déni systématique de tout ce qui peut intéresser l’environnement proche du cratère et ignoreront sciemment cette conduite d’eau brute, affirmant péremptoirement qu'il n'y avait rien de particulier sous le remblai et la dalle en béton du hangar 221, pur mensonge.

En 2009, à la sortie de la Salle Mermoz où avait lieu le procès, j’ai posé de vive voix la question de cette conduite à l’expert Daniel Van Schendel. Il m’a dans un premier temps affirmé qu’il n’avait trouvé aucune conduite de ce type dans le cratère. Bien entendu il dut reconnaître l’absurdité de sa réponse quand je lui ai indiqué que le plan de la SAUR montrait une conduite à 1 m de profondeur tout le long du tas d’ammonitrate et que cette conduite a dû étre complètement ruinée suite à l'explosion. Cet expert judiciaire se moquait éperdument des détails des plans de la SAUR et de l'usine AZF.



VII - L’expertise de la société Bérengier : ignorée par le SRPJ de Toulouse


Mais cette conduite n’est pas la seule à fournir des éléments originaux dans ce secteur ouest du cratère. Suite à des mesures électromagnétiques réalisées fin 2001 par le responsable électricien de l’usine AZF, Jacques Palluel, une expertise fut commandée dès décembre 2001 par le parquet de Toulouse pour mesurer les éventuelles anomalies électromagnétiques et magnétométriques dans le secteur du cratère.

La société Bérengier en charge de cette étude, confirma l’existence d’un axe original dirigé vers le Nord-Ouest présentant des signaux magnétométriques exceptionnels. L’axe est quasiment parallèle à la grande trace au sol et à une très faible distance. Tout comme la trace au sol plus marquée vers le cratère, les signaux EM sont moins prononcés et donc plus enfouis à proximité des lèvres du cratère. L’axe des anomalies électromagnétiques est, de plus, bien plus long que celui de la trace au sol. La société Bérengier a même soupçonné l’existence d’un câble électrique souterrain traversant en biais la zone du cratère.

Quelques mois plus tard, fin 2002, la société Geoïd-Fugro en charge des détections magnétométriques et électromagnétiques depuis le survol d’un hélicoptère, notera également des anomalies similaires à celles de la société Bérengier dans la même zone du cratère.


Malgré tous ces rapports, les experts judiciaires vont poursuivre leurs démarches d’investigation comme si ces éléments techniques n’avaient jamais existé et ne répondront donc à aucune de ces bizarreries.
La société Bérengier remarquera, en outre, un autre axe rectiligne Sud-Nord de mesure ferromagnétique en profondeur passant sous le cratère à peu près au niveau de l’extrémité de la conduite d’eau. Lors de ses travaux sur le terrain, les ingénieurs de Bérengier remarqueront la présence de bulles de gaz émergeant de la nappe d’eau qui avait pris place dans le cratère.
Ces traces Nord-Sud coïncident avec un plan militaire de 1917 montrant de grands traits noirs traversant l’ONIA (prédécesseur d’AZF) du Nord au Sud. Là encore ce plan militaire, montré lors du procès en Appel aux experts judiciaires qui avaient étudié le sous-sol de la zone du cratère, n’obtint aucune réponse de ces experts, incapables d’expliquer aux parties civiles, des données fournies pourtant sur des plans qu’ils avaient eux-mêmes introduits dans le dossier.


L’ensemble des experts judiciaires mépriseront tous ces éléments insolites touchant la zone du cratère. On assiste à un déni constant et malhonnête de ces experts qui a perduré tout au long de cette affaire AZF-Toulouse.
On peut également se demander alors pourquoi le parquet de Toulouse qui avait invité la société Bérengier à mesurer ces phénomènes, suite à ces études finalisées en 2003, a renoncé  à toute poursuite d’étude complémentaire sur cette zone Ouest du cratère.


VIII - Des témoignages d’un premier panache près du hangar 221 ignorés par la justice


Le dossier judiciaire recèle également des dépositions de témoignages visuels d’un premier grand panache de fumée émergeant dans le secteur Nord de l’usine AZF quelques secondes avant l’explosion finale. Ce panache très vertical et évasé légèrement vers le haut comme un cône, fut parfois décrit comme tourbillonnant et s’effondrant brutalement sur lui-même avant d’être suivi par l’énorme explosion finale.
Ces témoins situés à différents endroits dans ou en dehors du pôle chimique ont bien eu le temps de voir ce panache. Ils le distinguent bien de celui de l’explosion d’AZF dont ils ont ressenti le souffle et dont ils ont même vu arriver à toute vitesse l’onde de pression.

>>> Témoignage de Christian Fuentes
 

Christian Fuentes, situé à environ 900 mètres du cratère tout au Sud de l’usine vit s'élever un premier panache de fumée sombre au dessus des toits de la zone Nord d’AZF. Il arrive à localiser la direction de ce panache grâce au toit du bâtiment KG qu’il a face à lui. Cette direction coïncide avec la partie Ouest du hangar 221. Le panache est soudain traversé par un éclair vertical en son centre et s'effondre alors sur lui-même avant la grosse explosion.



>>> Témoignage de Philippe Efferméant

Philippe Efferméant, à environ 2,5 km au Nord-Est du cratère, au 5ème étage, 11 boulevard des Récollets, voit une première colonne s’élever rapidement dans la direction de la tour verte et jaune de Prilling qui domine le secteur Nord d’AZF. Il voit alors ce panache en partie s'effondrer, puis survint l’onde de pression couchant les arbres des rives de la Garonne avant d'arriver sur lui. Là encore depuis son point de vision, ce panache aurait pu se trouver à l’Ouest du hangar 221.

Une dizaine d’autres témoignages mentionnent ce premier panache sombre montant verticalement et disparaissant juste après lorsque survint la grosse explosion principale et son énorme champignon ocre. Les délais sont très courts entre les deux phénomènes mais étonnamment les experts judiciaires n'ont jamais mentionné ces deux phases qui concernaient le secteur du hangar 221.

Le panache vertical aurait-il coïncidé au sol avec le départ de la grande trace ? Rien n’exclut cette hypothèse dans le dossier.

Ce panache viendrait-il des galeries souterraines possiblement mentionnées sur le plan de 1917 ? Proviendrait-il de la conduite d’eau ?

>>> Témoignage de Stéphanie Maséra

Stéphanie Maséra racontera au procès de première instance son vécu.
Stéphanie Maséra, stationnée à moins de 100 mètres du cratère pour livrer un colis UPS, a vu pendant une fraction de seconde un nuage de poussière arriver sur elle avant même de recevoir l’énorme souffle qui a arraché sa portière et son bras droit. Elle était au Nord-Ouest du cratère devant la façade Nord du bâtiment RCU-SIS. A cette distance très courte du cratère, elle n’avait aucune chance de voir arriver l'onde de pression supersonique surgissant à plus de 3000 m/sec du cœur du tas d’ammonitrate. Elle a bien vu un phénomène antérieur à l’explosion finale, phénomène qui a, de plus, été précédé par le passage d’un faisceau lumineux au-dessus de sa camionnette. 

A-t-elle subi un des effets mécaniques du même phénomène qui aurait provoqué la trace au sol ? 

Le faisceau lumineux a-t-il un lien avec l'éclair vertical vu par M. Fuentes ?



Camionnette de Stéphanie Maséra le 22 septembre 2001 vers 14h00 (Photo SAMU)
Tous ces témoignages seront à nouveau ignorés par les experts judiciaires. Ils n'obtiendront pas plus d'explication avec les juges d'instruction et les juges des procès qui n'auront de cesse d'essayer d'inverser la chronologie des événements pour éviter de reconnaître que des événements antérieurs à l'explosion ont bien eu lieu, même dans le secteur du hangar 221.